Publiée à LENGRES en 1588 par Thoinot ARBEAU, anagramme de Jehan TABOUROT, chanoine, l'orchésographie est un traité de danse unique qui recense les danses pratiquées à cette période avec l'explication des pas et également les tablatures présenté comme un dialogue entre le maitre Arbeau et son éléve Capriol.
quelques extraits.............
"dance vient de dancer, que l'on dit en latin Saltare : dancer c'est à dire saulter, saulteloter, caroler, baler, treper, trépiner, mouvoir & remuer les pieds, mains & corps de certaines cadances, mesures e&, consistans en saultz, pliements de corps, divaricationse claudications, ingeniculations, elevations, jactations & pieds, permutations & autres contenances,..."
"la dance ou saltation est un art plaisant & profitable, qui rend & conserve la santé, convenable aux jeunes, agréabke aux vieux & bien seant à tous, pourvu qu'on use moderement en temps & lieu, sans affectation vicieuse : je dis en temps et lieu, parce qu'elle apporteroit mespris à celluy qui comme un pillier de salle y seroit trop assidu"
"sans la vertu rithmique, la dance seroit obscure & confuse: daultant qu'il fault que les gestes des membres accompaignent les cadances des instruments musicaulx, & ne fault pas que le pied parle d'un, & l'instrument daultre. Mais principallement tous les doctes tiennent que la dance est une espece de Rhetorique muette, par laquelle l'orateur peult par ses mouvements, sans parler un seul mot, se faire entendre, & persuader aux spectateurs, quil est gaillard digne d'estre loué, aymé, & chery. N'est-ce pas à vostre advis une oraison qu'il faict pour soy-mesme, par ses pieds propres, en gendre demonstratif? Ne dit il pas tacitement à sa maistresse (qui le regarde dançer honnestement & de bonne grace) aymés moy, desirés moy?
sur les danses "Basse danse"il y avoit deux sortes de basses-dances les unes communes & regulieres les aultres irregulières"
"les musisiens d'alors composoient leurs chansons de seize mesures qu'ils repetoient, & ainsi estoient trente deux mesures pour le commencement : & pour la mediation mectoient seize mesures, & sur la fin seize mesures repetées qui faisoient trente deux mesures, ainsi en tous estoient quatrevingtz mesures, dont la bassedance commune & reguliere estoit composee"
"en premier lieu, quand vous serés entré au lieu, ou est la compagnie préparée pour la dance, vous choisirés quelque honneste damoiselle telle que bon vous semblera & ostant le chappeau ou bonnet, de votre main gaulche, luy tendrés la main droicte pour la mener dancer. Elle sage é bien aprise, vous tendra la main gaulche, & se levera pour vous suyvre. Lors la conduyrés au bout de la salle, à la veüe d'un chacun, & advertirés les joueurs d'instrumentz de sonner une basse danse. Car aultrement ilz pouroient sonner par inadvertance quelque aultre sorte de dances. et quant ilz commenceront à sonner, vous commencerés à danser. Et notterés que leur demandant une basse dance, ilz entendront assés qu'en demanderés une reguliere & commune : toutefois si lair d'une chanson sur laquelle est formée une basse dance vous aggreoit plus que d'une aultre, pourrés leur nommer le commencement de la chanson".
"la Pavane, laquelle on dançoit ordinairement auparavant la basse-dance: Ladicte pavane n'a pas esté abolie & mise hors d'usage du tout, & croy qu'elle ne le sera jamais, vray est qu'elle n'est pas si frequentée que par le passé: Noz Joueurs d'instruments la sonnent quand on meyne espouser en face de saincte Eglise une fille de bonne maison, & quant ils conduisent les prebstres, le batonnier & les confreres de quelque notable confrairie"
"le gentilhomme la peult dancer ayant la cappe & lespe : et vvous aultres vestuz de vos longues robes, marchant honnestement avec une gravité posee. el les damoisellesavec une contenance humble, les yeuls baissez regardans quelquesfois les assistans avec une pudeur virginale. et quant à la pavane, elle sert aux Roys, Princes & Seigneurs graves, pour se monstrer en quelque jour de festin solemnel, avec leurs grands manteaux & robes de parade".
"Ceulx qui dancent la Gaillarde aujourd'huy par les villes, ilz dancent tumultuairement, & se contentent de faire les cinq pas & quelques passages sans aulcune disposition & ne se soucient pourveu qu'ilz tumbent en cadance: tellement qu'une grande partie de leurs meilleurs passages sont incogneuz & perduz: Du commencement on la dançoit avec plus grande discretion. Car aprés que le danceur avoit prins une damoiselle, & qu'ilz s'estoient plantés au bout de la salle, ilz faisoient aprés la reverence, un tour ou deux par la salle, marchans simplement: Puis le danceur laschoit ladicte damoiselle, laquelle alloit en danceant jusques au bout de ladicte salle, ou estant, elle faisoit une station en danceant en ce mesme lieu: Cependant le danceur qui la suyvoit se venoit presenter devant elle, & y faisoit quelque passage en tornant s'il vouloit à droict, puis à gauche. Ce faict, elle marchoit danceant jusques à l'àultre bout de la salle ou ledict danceur l'alloit chercher en danceant, pour faire devant elle quelque aultre passage. Et ainsi continuants ces allees & ces venues, ledict danceur faisoit passages nouveaux, monstrant ce qu'il sçavoit faire, jusques à ce que les joueurs d'instruments faisoient fin de sonner. Lors il faisoit la reverence, prenant là damoiselle par la main en la remerciant, la restituoit au lieu ou il l'avoit prise"
Pour avoir les descriptions précises et tous les éléments annexes, voir le site de Nicolas GRANER (lien orchésographie) ou le fac similé du document original sur Dance Instruction Manual